Quand les citoyens changent la mobilité à Bruxelles

by | 22 Août 2025 | Environnement, Politique et société, Transition | 0 comments

À Bruxelles, la mobilité urbaine est un sujet qui divise, mobilise… et évolue. Si les autorités régionales et communales restent aux commandes des plans de déplacement, une nouvelle tendance s’impose depuis quelques années : les citoyens prennent la parole et influencent les décisions.

Ils s’organisent en collectifs, participent aux enquêtes publiques, interpellent les élus et imaginent eux-mêmes les usages de leur rue. Ce n’est plus seulement une question de transport. C’est un combat pour une ville plus vivable, plus inclusive, plus humaine.

Comment ces actions locales parviennent-elles à transformer la politique de mobilité à Bruxelles ? Cet article retrace des cas concrets où la voix citoyenne a vraiment pesé, et esquisse une nouvelle manière de co-construire la ville.

Bruxelles, laboratoire de démocratie urbaine

Capitale européenne, Bruxelles est aussi une ville compacte, dense, et souvent congestionnée. Chaque jour, près de 370 000 navetteurs entrent dans la Région, auxquels s’ajoutent les habitants, les touristes et les nombreux déplacements intercommunaux. Cette pression crée des tensions sur l’espace public, partagé entre voitures, vélos, piétons, transports en commun, livraisons, et loisirs.

Pour répondre à ces enjeux, les autorités régionales ont lancé le plan Good Move en 2020. Objectif : réduire le trafic de transit, favoriser les mobilités douces et améliorer la qualité de vie dans les quartiers. Mais ces ambitions ne peuvent se concrétiser sans dialogue avec les citoyens.

C’est là qu’intervient la démocratie participative. À Bruxelles, elle prend différentes formes :

  • enquêtes publiques, obligatoires pour tout plan de mobilité local

  • commissions de concertation, où les habitants peuvent s’exprimer

  • budget participatif dans certaines communes

  • et de plus en plus, des assemblées citoyennes ou panels tirés au sort

Pour autant, la participation reste parfois inégale. Certaines voix s’organisent mieux que d’autres. Les collectifs les plus actifs s’impliquent à chaque étape des projets. D’autres, faute d’accès ou d’information, restent à l’écart.

📊 Chiffres clés – Mobilité et participation à Bruxelles

  • 19 communes, chacune compétente en aménagement local

  • Environ 250 consultations publiques par an sur l’urbanisme et la mobilité

  • 62 % des Bruxellois souhaitent moins de voitures dans leur quartier

  • Objectif de Good Move : –25 % de trafic automobile interne d’ici 2030

Quand les citoyens prennent l’initiative

À Bruxelles, certains changements de mobilité n’ont pas été décidés en haut lieu. Ils sont venus d’en bas, portés par des habitants décidés à transformer leur rue, leur quartier, leur ville. Ces citoyens ne se contentent plus d’attendre les décisions : ils les provoquent.

Le collectif Pentagone Piéton a largement contribué à la piétonnisation des boulevards du centre en 2015 grâce à des campagnes publiques et des marches exploratoires.

À Forest, des habitants ont obtenu la création d’une zone de rencontre devant une école. Le projet a été intégré dans les plans communaux après plusieurs mois de mobilisation.

À Schaerbeek, des parents d’élèves ont porté un projet de chemin scolaire sécurisé, avec l’aide d’associations. Ce projet a abouti à des aménagements concrets : marquages, limitations de vitesse et mobilier urbain.

Ces collectifs s’appuient sur des pétitions, des alliances associatives, et parfois des recours juridiques. Ils prouvent qu’un petit groupe bien structuré peut faire évoluer des décisions à l’échelle de la ville.

Des impacts concrets sur les politiques publiques

Les mobilisations citoyennes ont déjà modifié le cours de plusieurs projets urbains à Bruxelles. Des plans de circulation ont été révisés. Des aménagements cyclables ajustés. Et parfois, des projets entiers suspendus.

Dans le quartier Haren, une mobilisation contre un parking a conduit à une relance de concertation. À Ixelles, la place Fernand Cocq a été réaménagée avec davantage d’espaces piétons après des retours d’habitants. Ces exemples montrent que la concertation améliore la qualité des projets, mais aussi leur acceptabilité.

📊 Chiffres clés – L’influence citoyenne dans l’espace public

  • 1 plan de quartier sur 3 modifié après concertation depuis 2020

  • Environ 90 collectifs citoyens actifs sur les enjeux de mobilité

  • 150 rues reconfigurées dans le cadre de Good Move (2020–2023)

  • +25 % de satisfaction dans les quartiers ayant bénéficié d’un dialogue citoyen renforcé

Témoignages : dialoguer pour transformer la ville

« Au début, on ne savait pas trop par où commencer. On voyait que la rue devenait dangereuse pour les enfants. Alors on a lancé un petit groupe, une pétition, et on est allés à la commune. Et petit à petit, notre voix a été entendue. »
Fatima, habitante d’Anderlecht et membre d’un collectif de quartier

« Les citoyens nous alertent sur des choses concrètes. Quand le dialogue est respectueux, on arrive souvent à des solutions plus équilibrées. »
Julien, collaborateur mobilité dans une administration communale

Ces voix rappellent que la ville se construit avec ses habitants. Et que l’expertise citoyenne est une ressource précieuse.

Une ville qui apprend, en dialogue avec l’Europe

D’autres villes ont pris de l’avance sur la démocratie urbaine. À Barcelone, le programme Superilles transforme les quartiers avec les habitants. À Paris, les budgets participatifs permettent de financer des aménagements portés par des collectifs. À Gand, la refonte du plan de circulation s’est faite étape par étape, avec consultation continue.

Bruxelles avance à son rythme, mais la tendance est claire : l’implication citoyenne devient un pilier de l’action publique locale. La création du Pacte de la Mobilité en est un exemple récent. Reste à élargir cette dynamique à tous les quartiers, à toutes les voix.

Donner sa voix pour façonner la ville

Bruxelles change. Mais ce changement ne vient pas seulement des institutions. Il vient aussi de ses habitants. Des citoyens qui se regroupent, proposent, interpellent, et finissent par faire bouger les lignes.

Leurs actions, souvent locales et discrètes, ont un impact réel sur la manière dont la ville est pensée et vécue. Loin d’opposer élus et habitants, cette dynamique révèle au contraire le potentiel du dialogue et de la co-construction.

Participer à une consultation, rejoindre un collectif, écrire à son échevin, organiser une marche exploratoire… Chacun peut agir, à son échelle. Parce qu’une ville partagée ne se décrète pas. Elle se construit ensemble.

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